Page:Maupassant - Mont-Oriol, Ollendorff, 1905.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
323
mont-oriol

ce dont je le loue, et il m’a chargé de vous demander, devant votre famille, si vous consentiriez à devenir sa femme.

Surprise ainsi, elle tourna vers son père des yeux troublés. Et le père Oriol, effaré, regarda son fils, son conseil ordinaire ; et Colosse regarda Andermatt qui reprit avec une certaine morgue :

— Vous comprenez, Mademoiselle, que je ne me suis chargé de cette mission qu’en promettant une réponse immédiate à mon beau-frère. Il sent très bien qu’il peut ne pas vous plaire et, dans ce cas, il quittera demain ce pays pour n’y plus jamais revenir. Je sais en outre que vous le connaissez suffisamment pour me dire, à moi, simple intermédiaire : « Je veux bien », ou : « Je ne veux pas. »

Elle baissa la tête, et, rouge, mais résolue, elle balbutia :

— Je veux bien, monsieur.

Puis elle s’enfuit si vite qu’elle heurta la porte en passant.

Alors Andermatt se rassit et, se versant un verre de vin à la façon des paysans :

— Maintenant, nous allons causer d’affaires, dit-il.

Et, sans admettre la possibilité même d’une hésitation, il attaqua la question de la dot, en s’appuyant sur les déclarations que le vigneron lui avait faites, trois semaines auparavant. Il évalua à trois cent mille francs, plus des espérances, la fortune actuelle de Gontran et il laissa entendre que si un homme comme le comte de Ravenel consentait à demander la main de la petite Oriol, une très charmante personne d’ailleurs, il était indubitable que la famille de