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mont-oriol

une des plus belles curiosités naturelles du pays.

Mais une cloche sonna derrière eux. Gontran s’écria : « Tiens, déjà le déjeuner ! » Ils se retournèrent.

Un grand jeune homme venait à leur rencontre. Gontran dit :

— Ma petite Christiane, je te présente M. Paul Brétigny.

Puis à son ami :

C’est ma sœur, mon cher.

Elle le trouva laid. Il avait des cheveux noirs, ras et droits, des yeux trop ronds, d’une expression presque dure, la tête aussi toute ronde, très forte, une de ces têtes qui font penser à des boulets de canon, des épaules d’hercule, l’air un peu sauvage, lourd et brutal. Mais de sa jaquette, de son linge, de sa peau peut-être, s’exhalait un parfum très subtil, très fin, que la jeune femme ne connaissait pas ; et elle se demanda : « Qu’est-ce donc que cette odeur-là ? »

Il lui dit :

— Vous êtes arrivée ce matin, Madame ?

Sa voix était un peu sourde.

Elle répondit :

— Oui, Monsieur.

Mais Gontran aperçut le marquis et Andermatt qui faisaient signe aux jeunes gens de venir déjeuner bien vite.

Et le docteur Honorat prit congé d’eux en leur demandant s’ils avaient l’intention réelle d’aller voir sauter le morne.

Christiane affirma qu’elle irait ; et, se penchant au bras de son frère, elle murmura, en l’entraînant vers l’hôtel :

— J’ai une faim de loup. Je serai très honteuse de manger tant que ça devant ton ami.