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mont-oriol

— Voulez-vous mon bras, madame ?

Elle prit ce bras qu’elle sentait aussi résistant que du fer ; et, comme son pied glissait sur l’herbe chaude, elle s’appuyait dessus ainsi qu’elle aurait fait sur une rampe, avec une confiance absolue.

Gontran, venu à leur rencontre, criait :

— C’est une source. L’explosion a fait jaillir une source !

Et ils entrèrent dans la foule. Alors les deux jeunes gens, Paul et Gontran, passant devant, écartèrent les curieux en les bousculant, et, sans s’inquiéter des grognements, ouvrirent une route à Christiane et à son père.

Ils marchaient dans un chaos de pierres aiguës, cassées, noires de poudre ; et ils arrivèrent devant un trou plein d’eau boueuse qui bouillonnait et s’écoulait vers la rivière, à travers les pieds des curieux. Andermatt était déjà là, ayant traversé le public par des procédés d’insinuation qui lui étaient particuliers, disait Gontran, et il regardait avec une attention profonde sourdre du sol et s’échapper cette eau.

Le docteur Honorat, debout, en face de lui, de l’autre côté du trou, la regardait aussi avec un air d’étonnement ennuyé. Andermatt lui dit :

— Il faudrait la goûter, elle est peut-être minérale.

Le médecin répondit.

— Elle est certainement minérale. Elles sont toutes minérales ici. Il y aura bientôt plus de sources que de malades.

L’autre reprit :

— Mais il est nécessaire de la goûter.

Le médecin ne s’en souciait guère :