Page:Maupassant - Théâtre, OC, Conard, 1910.djvu/225

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de le haïr. EIi bien ! malgré cette haine légitime, malgré le dégoût, l’horreur que doit m’inspirer à présent ce mari qui m’a dédaignée, trompée, qui a couru sous mes yeux, de fille en fille, il peut à son gré exiger de moi un honteux, un infâme abandon !… Je n’ai pas le droit de me cacher, car je n’ai pas le droit d’avoir une clef qui ferme ma porte. Tout est à lui : la clef, la porte et la femme !… Mais c’est monstrueux, cela ! N’être plus maître de soi, n’avoir plus la liberté sacrée de préserver sa chair de pareilles souillures ; ne voilà-t-il pas la plus abominable loi que vous ayez établie, vous autres ?

Jacques de Randol.

Oh ! je comprends bien ce que vous devez souffrir, mais je ne vois point de remède. Aucun magistrat ne peut vous protéger ; aucun texte ne peut vous garantir.

Madame de Sallus.

Je le sais bien. Mais quand on n’a plus ni père ni mère, quand la police est contre vous et quand on n’accepte pas les transactions dégradantes dont s’accommodent la plupart des femmes, il y a toujours un moyen.

Jacques de Randol.

Lequel ?

Madame de Sallus.

Quitter la maison.

Jacques de Randol.

Vous voulez ?…