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Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/324

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— Que lisez-vous donc là, ma chère Blanche ? lui dit Mme de Dammartin qui reparut presqu’aussitôt.

Mlle de Nerval tressaillit.

— Je suis toute nerveuse aujourd’hui, fit la jeune fille ; vous m’avez fait peur. Ce que je lisais, dit-elle en embrassant Mme de Dammartin pour cacher son embarras, je n’oserai pas vous le dire ni même vous le montrer ; ce sont des vers.

— Que l’on vous aurait remis ?

La jeune fille secoue la tête.

— Que vous avez faits ?

La jeune fille fit un mouvement de tête affirmatif pour soutenir ce gros mensonge.

— Quelle folie ! une jeune fille faire des vers ! Si votre oncle le savait, il vous gronderait fort ; montrez les-moi.

— Oh ! non, vous vous moqueriez par trop, vraiment ; c’est un enfantillage dont je ne veux pas laisser de trace.

Mme de Dammartin n’insista pas ; mais elle lui jeta un regard qui fit de nouveau rougir la jeune fille ; puis, au bout d’un instant, elle lui dit :

— J’ai une visite indispensable à rendre à Mme de Senneterre ; voulez-vous m’accompagner ?

— Excusez-moi, madame, je me sens très paresseuse ce soir.

La jeune fille entrevoyait tout à coup, grâce à la sortie successive de son oncle et de Mme de Dammartin, la possibilité de tenir à d’Havrecourt la promesse téméraire qu’elle lui avait faite, mais elle se sentait toute tremblante en y pensant.

— Décidément, cette enfant a quelque chose, se dit Mme de Dammartin.