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Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/192

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L’INQUIÉTUDE DE NOTRE MORALE

chastes, depuis que nous avons reconnu que l’œuvre de la chair, maudite durant vingt siècles, est naturelle et légitime. Nous ne sortons plus à la recherche de la résignation, de la mortification, du sacrifice, nous ne sommes plus humbles de cœur ni pauvres d’esprit. Tout cela est fort légitime, attendu que ces vertus dépendaient d’une religion qui se retire ; mais il n’est pas bon que la place reste vide. Notre idéal ne demande plus à créer des ascètes, des vierges, des martyrs ; mais bien qu’elle prenne une autre route, la force spirituelle qui animait ceux-ci doit demeurer intacte et reste nécessaire à l’homme qui veut aller plus loin que la simple justice. C’est par delà cette simple justice que commence la morale de ceux qui espèrent en l’avenir. C’est dans cette partie peut-être féerique mais non pas chimérique de notre conscience que nous devons nous acclimater et nous complaire. Il est encore raisonnable de nous persuader qu’en le faisant nous ne sommes pas dupes.