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Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/274

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NOTRE DEVOIR SOCIAL

C’est peut-être, comme je l’ai dit, l’argument le plus inquiétant. Mais, sans doute, attache-t-il trop d’importance à un danger assez incertain. Au surplus, il y aura à cette brève interruption de la victoire humaine, de prodigieuses compensations. Pouvons-nous prévoir ce qu’il adviendra lorsque l’humanité entière prendra part au labeur intellectuel qui est le labeur propre à notre espèce ? Aujourd’hui, c’est à peine si un cerveau sur cent mille se trouve dans les conditions pleinement favorables à son activité. Il se fait en ce moment un monstrueux gaspillage de forces spirituelles. L’oisiveté endort par en haut autant d’énergies mentales que l’excès de travail manuel en éteint par en bas. Incontestablement, quand il sera donné à tous de se mettre à la tâche à présent réservée à quelques élus du hasard, l’humanité multipliera des milliers de fois ses chances d’arriver au grand but mystérieux.