Aller au contenu

Page:Maurice Pescatore - Chasses et voyages au Congo, 1932.djvu/143

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
127
chasses et voyages au congo

arrière nous montre en raccourci, tout le pays dont nous venons, et lui disant adieu pour toujours sans doute, avec petit serrement de cœur comme lorsqu’on quitte un être ou une chose qu’on ne doit plus revoir, nous commençons un peu mélancoliquement à descendre la pente de l’autre côté, mais bientôt cette impression de tristesse s’efface et nous sommes vite repris par le plaisir toujours nouveau des découvertes qu’on fait du haut de son tippoye dans ce pays de contes de fées. Depuis notre passage il y a un mois, et à la suite des nombreuses pluies, les herbes ont beaucoup grandi, et l’on croirait voir d’énormes champs de blé au printemps qui me rappellent l’époque du passage des cailles en Algérie quand plaines et collines étaient couvertes de leur épaisse couche de verdure. Dans l’air un parfum flottant vous pénètre et vous grise peu à peu ; ce sont les effluves des mille fleurs dont les prairies sont émaillées, et plus encore des grappes de mimosas qui pendent comme des boules d’or au milieu de la plaine ; je me rappelle surtout d’énormes digitales blanches qui forment de véritables bouquets, et dont nos boys font une ample moisson pour orner leurs chapeaux. La caravane est du reste joyeuse, elle sent le retour au pays et lorsque nous arrivons à la hauteur du col à 1.550 mètres tous nos hommes se mettent à chanter à la vue du Sultanat de Kalembe-Lembe qui se trouve devant eux ; dans le fond on aperçoit le village et la Texaf et un peu plus loin, le ruisseau et le marais où jadis j’étais allé à la recherche des buffles. La descente fut rapide, et avant midi, nous étions rendus à l’habitation de M. C., mais le propriétaire du logis ne s’y trouvait pas, étant parti en chasse avec un camarade, et à sa place était installé M. P., également prospecteur, qui nous fit aimablement les honneurs de la maison de son ami et avec lequel nous partageâmes ses provisions et les nôtres en un cordial dîner du Jour de l’An improvisé. Comme quoi dans la brousse il n’existe pas de formalités