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Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/125

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le premier acte, les spectateurs se fussent enfuis en tumulte en poussant des cris de terreur, Edgar Poe aurait été content de nous. Quant à moi-même, je n’étais pas sans inquiétude, et, une fois, j’osai risquer quelques timides observations sur certains côtés peut-être un peu excessifs de notre conception. Je n’oublierai jamais l’air de souverain dédain avec lequel me toisa Léon Cladel. « Alors, j’étais un peureux, un hésitant, comme les autres ! je manquais d’audace ! je reculais devant l’arrachement d’une barbe ! » Remarquez que j’étais d’autant plus désintéressé dans la question que moi-même, dans ce temps-là, je n’avais pas de barbe du tout. Mais Léon Cladel ne fut pas attendri par mon extrême juvénilité ; il me signifia que la collaboration était rompue, que nous ferions le drame chacun de notre côté, et il me donna rendez-vous pour un mois plus tard, à jour précis, chez le directeur du théâtre de la Porte-Saint-Martin. Il va sans dire que nous manquâmes à ce rendez-vous, — tous les deux ! Il était écrit que messire Escabala garderait sa barbe. Mais bientôt Cladel et moi nous nous revîmes, et la camaraderie ébauchée devint une