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Page:Mendès - Les Oiseaux bleus, 1888.djvu/244

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LE RAMASSEUR DE BONNETS

nues au cœur encore introublé, et ceux-là me reviennent vite, sachant déjà le chemin. J’en fais des chemises de noces et des draps de lit nuptial, pour les amoureuses qui sanctifient leur péché en devenant épouses. J’en fais des robes de bal qui conseillent, par leur frôlement, les abandons de la valse, des rideaux pour les alcôves, et, j’en fais aussi, — car je ne sais où les fourrer, — des nappes de festin et des nappes d’autel. Mais il ne suffirait pas, pour les employer tous, d’en vêtir toutes les femmes et tous les hommes, d’en parer tous les appartements, d’en orner tous les temples. Je les mêle à la nature, pour m’en débarrasser. Grâce à moi, ils fleurissent en églantines, s’éparpillent en giboulées, s’égouttent en rosée matinale, s’effiloquent en fils de la Vierge ; je les déchire en papillons qui aiment les roses, se souvenant des lèvres ; l’oiseau s’en sert pour que son nid soit plus doux ; leur mousseline frissonne dans les buées du matin, glissant sur les prairies ; ce sont leurs pâles rubans qui se déroulent dans l’interminable longueur des grandes routes plates, leurs ru-