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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome I, 1782.djvu/20

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xv
Préface

possible d’être heureux à Paris, parce que les jouissances hautaines des riches y poursuivent de trop près les regards de l’indigent. Il a lieu de soupirer, en voyant ces prodigalités ruineuses, qui n’arrivent jamais jusqu’à lui. Il est bien au-dessous du paysan, du côté du bonheur ; c’est l’homme de la terre, j’oserai le dire, le moins pourvu pour son besoin ; il tremblera de céder au penchant de la nature ; & s’il y cede, il fera des enfans dans un grenier. N’y a-t-il pas alors contradiction manifeste entre naissance & non-propriété ? Ses facultés seront abâtardies, & ses jours seront précaires. Les spectacles, les arts, les doux loisirs, la vue du ciel & de la campagne ; rien de tout cela n’existe pour lui : là enfin, il n’y a plus de rapport ni de compensation entre les différens états de la vie ; là, la tête tourne dans l’ivresse du plaisir ou dans le tourment du désespoir.