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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome I, 1782.djvu/252

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CHAPITRE LXXII.

L’Homme aux cent soixante millions.


J’étois dans un café, assis à côté d’un Russe qui m’interrogeoit curieusement sur Paris. Entre un assez gros homme en perruque nouée ; son habit étoit un peu râpé & le galon usé ; il s’assied dans un coin, & hume une bavaroise avec la lenteur de l’ennui & la langueur du désœuvrement & de l’inoccupation.

Vous voyez bien, dis-je à mon voisin, cet homme-là qui bâille, & qui n’aura pas fait dans une heure ? — Oui, me dit-il. — Eh bien, c’est le soutien de l’état & du trésor royal. — Comment ? — C’est lui qui donne au roi de France cent soixante millions & plus par an, pour entretenir ses troupes, sa marine & sa maison. Il a affermé les cinq grosses fermes ; avant-hier il en a signé le contrat avec le monarque ; les fer-