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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome I, 1782.djvu/36

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d’Argus. Des barrieres de sapin, plus respectées que ne le seroient des murailles de pierres bordées de canons, arrêtent les denrées les plus nécessaires à la vie, & leur imposent une taxe que le pauvre supporte seul ; car, dispensé de tous les plaisirs, il ne l’est pas du besoin de manger. Il ne tiendroit qu’au prince d’affamer la ville ; il tient en cage ses bons & fideles sujets ; & s’il étoit mécontent, il pourroit leur refuser la béquée : avant qu’ils pussent forcer les barreaux, les trois quarts se seroient mangés, ou seroient morts de faim.

Il faut que tout le monde vive ; car la premiere loi est de subsister. Je vois cette ville florissante, mais aux dépens de la nation entiere. Ces maisons à six étages tous peuplés, aspirent les moissons & les vignes à cinquante lieues à l’entour ; ces laquais, ces baladins, ces abbés, ces batteurs de pavé ne servent ni l’état ni la société ; il faut cependant que tout cela subsiste, comme le dira mon premier chapitre sur la législation, intitulé, De l’estomac de l’homme. Il y a des maux poli-