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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IV, 1782.djvu/285

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un nuage les matieres littéraires ; il n’a pas toute la connoissance possible des objets. Son incapacité s’accommode des brusqueries ; & sa paresse le mettant hors d’état de porter un arrêt exact & motivé, il veut quelqu’un (dût-il en être trompé) qui le décide, & qui lui fournisse périodiquement une petite sentence meurtriere. Car qu’y a-t-il de plus triste que d’entendre l’éloge d’un contemporain ? S’il faut louer quelque chose à Paris, ce ne doit être que par communication, par frénésie, par esprit de parti ; & tout ce qui n’est pas divin, comme l’a dit Helvétius, devient détestable. Il faut, dans certaines cotteries, être tout-à-la-fois frondeur & enthousiaste, & passer rapidement à ces deux extrémités, pour savoir bien juger les hommes & les livres.

On prétend qu’une ville immense comme Paris a un besoin journalier de petites satyres, pour repaître son inquiétude & son agitation perpétuelle ; & celui-là avoit bien raison, qui a dit le premier, qu’une benne injure est