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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/162

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Je dirai ce que j’ai vu. On avoit ouvert ces augustes souterreins où l’on dépose avec pompe la dépouille mortelle de nos rois. Un jeune prince, moissonné dans la fleur de son âge[1], alloit y prendre place près de ses ancêtres. Là, dans cette cour silencieuse & triste, les rois sont seuls & ne sont plus flattés. Chaque pas que je faisois m’offroit un sceptre brisé & le néant des grandeurs humaines. Un triple cercueil sembloit vouloir séparer leur orgueilleuse poussiere de celle des autres hommes ; mais malgré le sceau royal, les cendres des enfans de la terre sont toutes égales & doivent se confondre un jour. Je traversois lentement ces voûtes sépulcrales, où la mort apparoît la véritable souveraine de l’univers. Je sentois là, plus qu’ailleurs, son vaste, universel & muet empire. De vains trophées dominoient les tombes des monarques pulvérisés. Ah ! combien l’ami des hommes s’effraie

  1. Le duc de Bourgogne, frere aîné de Louis XVI, actuellement régnant.