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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/223

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discordance choquante. On entend de tous côtés des cris rauques, aigus, sourds. Voilà le maquereau qui n’est pas mort ; il arrive, il arrive ! Des harengs qui glacent, des harengs nouveaux ! Pommes cuites au four ! Il brûle, il brûle, il brûle ! Ce sont des gâteaux froids. Voilà le plaisir des dames, voilà le plaisir ! C’est du croquet. À la barque, à la barque, à l’écailler ! Ce sont des huîtres. Portugal, Portugal ! Ce sont des oranges.

Joignez à ces cris les clameurs confuses des frippiers ambulans, des vendeurs de parasols, de vieille ferraille, des porteurs d’eau. Les hommes ont des cris de femmes, & les femmes des cris d’hommes. C’est un glapissement perpétuel ; & l’on ne sauroit peindre le ton & l’accent de cette pitoyable criaillerie, lorsque toutes ces voix réunies viennent à se croiser dans un carrefour.

Le ramonneur & la marchande de merlans chantent encore ces cris discordans en songe quand ils dorment, tant l’habitude leur en fait une loi.