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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/265

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tente infaillible. Il écrivoit séparément à M. Blin & à M. de la Harpe : vous serez mon successeur ; c’est vous qui me remplacerez. Et ces poëtes crédules, chacun de son côté, estimerent que leur prodigieux mérite avoit forcé la voix prophétique du vieillard.

Quelqu’un lui dit un jour : comment flattez-vous à ce point de petits talens ? Ces auteurs déjà si vains en perdront la tête. Que voulez-vous que je fasse ? Je n’ai que ce moyen de me débarrasser d’eux. Voulez-vous que je leur dise qu’ils ne sont que des étourneaux, tandis qu’ils se croient des aigles ? Ils ne me croiroient pas, & aiguiseroient leur plume contre moi. Puisqu’ils ont la rage de faire des tragédies & des poëmes assoupissans, qu’ils rimaillent. Pendant qu’ils cultivent cette immortalité dont je les gratifie, je respire, & je suis tranquille.