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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VII, 1783.djvu/206

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public, exige quelquefois que l’on cache certaines vérités. Quand elles tombent sans préparation au milieu d’un peuple, elles causent une explosion qui ne tourne pas au profit de la vérité, & ne fait qu’irriter les nombreux ennemis de toute lumiere. D’ailleurs chacun se croit appellé à juger & à prononcer sur ces graves & importantes matieres ; il en résulte une confusion & une discordance qui ne produisent que du bruit ; les sciences livrées indiscrétement à tous les esprits perdent de leur majesté ; elles se dégradent sous des mains téméraires, folles ou basses, qui les défigurent ou les vendent au pouvoir.

Le but de la double doctrine n’étoit pas un artifice pour conserver la réputation des sciences & de ceux qui les cultivoient ; mais une précaution sage pour empêcher les esprits esclaves de toucher aux vérités politiques & morales, dont la discussion ne convient qu’aux ames généreuses, parce que les ames timides les abaissent à leur niveau, tandis que les esprits violens déplacent au lieu d’arranger.