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la guerre des mondes

Je m’aperçus que j’étais là sur cette lande obscure sans aide, sans secours, et seul. Soudain, comme quelque chose qui tombe sur vous du dehors, la peur me prit.

Avec un effort je me retournai et m’élançai, en une course trébuchante, à travers la bruyère.

La peur que j’avais n’était pas une crainte rationnelle — mais une terreur panique, non seulement des Marsiens, mais de l’obscurité et du silence qui m’entouraient. Elle produisit un tel extraordinaire effet d’abattement sur moi qu’en courant je pleurais silencieusement comme un enfant. Maintenant que j’avais tourné le dos, je n’osais plus regarder en arrière.

Je me souviens d’avoir eu l’extraordinaire impression que l’on se jouait de moi et qu’au moment où j’atteindrais la limite du danger, cette mort mystérieuse — aussi soudaine que l’éclair — allait surgir du cylindre et me frapper.



vi

LE RAYON ARDENT SUR LA ROUTE DE CHOBHAM


La façon dont les Marsiens peuvent si rapidement et silencieusement donner la mort est encore un sujet d’étonnement. Certains pensent qu’ils parviennent, d’une manière quelconque, à produire une chaleur intense dans une chambre de non-conductivité pratiquement absolue. Cette chaleur intense, ils la projettent en un rayon parallèle contre tels objets qu’ils veulent au moyen d’un miroir parabolique d’une composition inconnue — à peu près comme le miroir parabolique d’un phare projette un rayon de lumière. Mais personne n’a pu indiscutablement prouver ces détails. De quelque