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Page:Mercure de France - 1914-06-16, tome 109, n° 408.djvu/87

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CHAPITRE TROISIÈME


1

Pourtant un grand calme était revenu, parce qu’on approchait de Noël. C’est la protection du petit Enfant, peut-être, qui est sur nous et y demeure, depuis le temps que sa mère le tenait dans ses bras, et il souriait à sa mère. Il venait un sourire au ciel. Cette blancheur se déroula jusqu’au fin fond de la vallée et les rigoles s’étaient tues, vides pour un temps de leur eau. Un élargissement se faisait dans les vies. On voit autour de soi l’exemple du silence à quoi on obéit, et c’est en vous alors comme si quelque chose se mettait à attendre : une trêve se fait pendant que Dieu descend.

Il y eut du bonheur dans la maison des Amphion, et comme les cloches sonnaient et le carillon dans le ciel balançait la bonne nouvelle, eux, assis devant le foyer, s’entretenaient de leur bonheur, Joseph et Héloïse Amphion. Décidément, le ventre d’Héloïse grossissait. Il n’y avait rien là d’ailleurs qui pût surprendre, elle en était à son sixième mois. Mais lui n’y pouvait croire encore, depuis le temps qu’il attendait et trois années de mariage, et ils avaient tout essayé, même ils avaient fait le printemps d’avant un pèlerinage à Sainte-Claire, rien de tout ça n’avait servi. Alors, n’est-ce pas ? on est étonné, quand même les signes sont les signes.

Il disait :

— Vilaine Héloïse, quelle boîte à surprise tu es ! Moi qui te maudissais déjà, à cause de ta sécheresse, et, sais-tu, si tu avais continué, je ne t’aurais plus aimée, ça n’aurait plus été possible, mais donne-moi vite un baiser…

Il jeta du bois dans le feu, d’où monta une grande flamme, et contre le mur noir de suie des petites étoiles s’allumaient.