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Page:Meyer - Girart de Roussillon, 1884.djvu/398

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girart de roussillon

ble ni fou, ni sot, ni trompeur : « Fouque, laisse la colère et la rancune ; qu’il te souvienne de Dieu le Rédempteur ! Homme qui s’irrite outre mesure est mauvais ; mais donne à Girart un meilleur conseil, afin qu’il fasse la paix avec Charles l’empereur. Qui n’observe pas la fidélité envers son seigneur perd ses droits sur son fief et sur sa terre, et, s’il vient en cour, il y est honni. »

286. Le comte Girart les entend se quereller ; il leur commande aussitôt de se taire : « Fouque, cessez désormais ce débat ; il est vilain de faire ainsi des menaces de guerre. On verra bien, lorsqu’on en sera à la chevauchée, qui fera le mieux, qui sera le plus dur à la peine. Et toi, Pierre, ainsi puisse Dieu t’aider ! pas un mot de plus, mais prépare-toi à partir sur-le-champ.

287. — Girart, vous n’avez rien de plus à mander à Charles ? — Si fait : s’il y consent, je lui propose un plaid général, aval dans la vallée, sous Saint-Vidal. Je lui ferai tout droit, si je lui ai fait tort, et que mon seigneur agisse de même à mon égard. — Tout ce que vous dites, » reprend Pierre, « ne vaut pas un œuf. Que mon seigneur soit maudit de saint Martial s’il ne vous enlève une cité d’ici à Noël ! et, je ne le priserais pas un berger[1], s’il ne vous donne pas l’assaut jusqu’à la palissade. » Là-dessus il allait monter à cheval, quand Fouque lui dit : « Arrêtez ! nous allons parler d’autre chose. »

288. Gilbert de Senesgart et Fouque son frère, et Girart, leur cousin, qui était le plus puissant d’entre eux, se sont tous trois appuyés à un mur. Fouque parla le premier : « Par Dieu ! cousin Girart, tu n’agis pas bien (?), mais fais connaître à ton seigneur ta pensée ; dis-lui que tu lui feras droit comme fit ton père, à condition qu’il te donne un sauf-conduit jusqu’à sa résidence[2]. S’il se refuse à le don-

  1. Au moyen âge, les bergers sont le type de la simplicité.
  2. C’est l’idée déjà exprimée par Girart, à la fin du § 259.