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Page:Meyer - Girart de Roussillon, 1884.djvu/562

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girart de roussillon

meilleure récompense que le roi, malgré tout l’or qu’il avait dépensé, et c’est à cela que Madame a eu égard[1].

654. « J’ai vu le moutier Sainte-Sophie, et je ne crois pas qu’il y ait jamais eu, et que jamais il y ait le pareil[2]. C’est un nom divin qu’on invoque[3]. » Ce discours fini, le comte se sentit envie de dormir. Il mit pied à terre et dormit sur l’herbe. Pendant son sommeil, il eut un songe. S’étant éveillé, il monta sur son palefroi et dit : « En route !

655. « Avancez, mes deux amis[4], » dit-il, « je vous con-

  1. On considérait comme une œuvre méritoire entre toutes de travailler matériellement à la construction des églises. On lit dans la légende de saint Silvestre, que l’empereur Constantin, converti par Silvestre, s’étant rendu à l’église Saint-Pierre de Rome, et y ayant confessé ses péchés, prit une bêche, se mit à creuser le sol pour faire les fondements d’une basilique, et emporta successivement sur ses épaules douze hottes pleines de terre ; Douhet, Dictionnaire des légendes, col. 1147 ; pour les sources, cf. col. 1153, note 622, et surtout Dœllinger, Fables relatives à la papauté, essai intitulé Constantin et Silvestre.
  2. La grandeur et la richesse de Sainte-Sophie paraissent avoir frappé vivement les Occidentaux. Voici un témoignage que fournit le roman des Sept Sages (édit. Keller, Tubingue, 1838) :

    Molt par i a riche abbeye ;
    En l’abbeye a grant tresor,
    615Car li bachin i sont tuit d’or
    Ki sont soz les lampes pendus,
    Che dient cil quels ont veüs ;
    Kis porroit vendre, par raison,
    L’avoir valent de Monbrison.

    Voir aussi la description que fait de Sainte-Sophie le chevalier historien Robert de Clari, éd. Riant, pp. 67-8 ; éd. Hopf, § lxxxv (Chroniques gréco-romanes, Berlin, 1873, p. 67).

  3. Cela veut dire probablement que sophia, attribut de la divinité et employé au moyen âge comme synonyme de sapientia (voy. du Cange, sophia), a fait partie de la série plus ou moins longue des noms de Dieu, que l’on invoquait et auxquels on attribuait des vertus préservatrices. Nous avons plusieurs de ces listes des noms divins ; voy. ci-dessus, p. 84, n. 1, mais je n’y vois pas figurer sophia.
  4. Andicas et Bedelon.