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Page:Meyer - Girart de Roussillon, 1884.djvu/59

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xli
iii. — l’ancienne et la nouvelle chanson

ment choquantes. Nous avons vu que la troisième partie du poème renouvelé correspondait au deuxième des récits extraits de la vie latine (p. xxxv). Il ne s’agit toutefois que d’une analogie très générale. Les dissemblances qu’on peut constater entre les deux récits sont très considérables. De part et d’autre, le roi est vaincu, mais, dans la vie latine, il est poursuivi jusque sous les murs de Paris[1], et la guerre continuerait si un ange ne venait lui ordonner de conclure la paix avec Girart. Dans le poème renouvelé, le roi est non-seulement battu, mais fait prisonnier. Il ne lui est donc nullement loisible de se réfugier dans Paris, comme dans l’autre récit qui vient sûrement de l’ancien poème, puisque, on l’a vu plus haut (p. xx), il se trouve non-seulement dans la vie latine, mais encore dans Renaut de Montauban. La paix est conclue grâce à l’entremise du pape et aux supplications du vainqueur. Il n’y a donc aucun doute que toute cette fin a été entièrement remaniée. Signalons quelques effets curieux de ce remaniement. Si Girart, au retour de son long exil, a obtenu du roi son pardon, c’est grâce à un véritable subterfuge de la reine (§ 545). Mais la parole du roi, accordée du reste à contre-cœur, n’engage nullement les anciens ennemis de Girart, les descendants du duc Thierri d’Ascane, dont la famille paraît avoir été de longue date en lutte avec celle de Girart[2]. Ceux-ci recommencent alors la guerre. Mais ce sont tous des personnages nouveaux. Thierri, en effet, est mort depuis longtemps, tué en trahison ; ses neveux ou ses fils ont

  1. « Novissime quoque eundem fugando, cecidit usque Parisius urbem, ac intra menia ejus ipsum cum suis manu pervalida viriliter detrusit » (§ 66).
  2. Voy. § 41.