la mort de Godefroi de Bouillon et de Bauduoin son frère, un roi appelé Raoul le justicier... Il eut de sa femme deux fils, Robert et Louis. » Puis on nous raconte que Louis, le plus jeune des deux frères, fut élu roi par les barons du royaume au détriment de son frère aîné[1]. Voilà ce qui, vers 1260, c’est-à-dire cent vingt ans environ après les événements racontés, passait en France pour de l’histoire de France.
Un sentiment naturel porte les hommes, même ignorants, à s’intéresser aux actions de leurs ancêtres. Les auteurs de chansons de geste prétendaient donner satisfaction à ce sentiment. Et comme ils n’étaient pas moins ignorants que leur auditoire, ils furent naturellement conduits à donner libre carrière à leur imagination. Assurément certains ont pu se trouver en possession d’une matière véritablement historique et la reproduire plus ou ou moins fidèlement. Tel a pu être le cas, par exemple, de l’auteur du Raoul de Cambrai primitif, mais ce cas n’a pas été celui de l’auteur de Girart de Roussillon.
- ↑ Récits du Ménestrel de Reims au xiiie siècle, publiés par M. N. de Wailly, §§ 2-5.