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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 1.djvu/174

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2 vol, in-8o ; elles parurent en 1785. Adanson a rassemblé dans ces deux volumes des connaissance immenses, et cet ouvrage devait faire prendre une nouvelle face à la botanique, en la débarrassant jamais des liens systématiques, en la ramenant à l’étude des rapports naturels. Mais Linné, qui soutenait l’opinion contraire, avait pris un tel ascendant sur son siècle, qu’Adanson ne put le surmonter. On profita de quelques accessoires qui donnaient prise à la critique ; telle était, entre autres, la tentative d’une nouvelle orthographe ; et bientôt cette excellente production parut tombée dans l’oubli. Cependant elle n’a pas été négligée par tout le monde ; car, depuis sa publication, on a présenté comme des découvertes des faits qui s’y trouvent. Il est vrai que dans l’état où sont les Familles des Plantes, on ne peut les compter au nombre des livres élémentaires ; mais il n’en est aucun qui puisse donner autant de connaissances à ceux qui ont vaincu les premières difficultés. L’auteur ne tarda pas à reconnaître lui-même les taches, ou, pour mieux dire, les bizarreries qu’on lui avait reprochées et il résolut de donner, cinq ans après, une nouvelle édition de son ouvrage. Il y avait fait les changements nécessaires et des additions nombreuses : mais, entrainé par des idées gigantesques, il conçut le plan d’une encyclopédie complète. On lui avait fait espérer que Louis XV favoriserait cette entreprise. Bercé par cette espérance, il ne s’occupa qu’à en rassembler les matériaux. En peu de temps, ils devinrent immenses, et, en 1775, il les soumit à l’Académie, sous ce titre : Plan et Tableau de mes ouvrages manuscrits et avec figures, depuis l’année 1771 jusqu’en 1715, distingués suivant une méthode naturelle découverte au Sénégal en 1749. 1er ouvrage : Ordre universel de la nature, ou Méthode naturelle comprenant tous les êtres connus, leurs qualités matérielles et leurs facultés spirituelles, suivant leur série naturelle, indiqués par l’ensemble de leurs rapports, 27 vol. in-8o ; 2o : Histoire naturelle du Sénégal, 8 vol. in-8o ; 3o : Cours d’histoire naturelle ; 4o : Vocabulaire universel d’histoire naturelle, servant de table à l’ordre universel, 1 vol. in-fol. de 1000 pages ; 5o : Dictionnaire d’histoire naturelle ; 6o : 40,000 figures de 40,000 espèces d’êtres connus ; 7o : Collection de 34,000 espèces d’êtres conservés dans mon cabinet. On peut imaginer quel fut l’étonnement que produisit une telle annonce. Les commissaires, nommés sur sa demande pour examiner son plan, trouvèrent ce travail prodigieux ; mais il ne leur parut pas également avancé dans toutes les parties ; par exemple, les 40,000 figures n’étaient autre chose que la collection de toutes celles qui avaient été publiées jusqu’alors. Cet examen donnait une haute idée des connaissances et de l’activité d’Adanson, mais il n’eut pas le résultat qu’il en attendait. Il avait cru que le gouvernement, sur le rapport qui en serait fait, lui fournirait les moyens de l’exécuter. On s’accoutuma dès lors à le regarder comme livré à la poursuite d’un projet chimérique. Le tort d’Adanson n’était pas de tenir à ce plan, mais de croire qu’il pouvait l’exécuter à la fois et d’un seul jet ; s’il eût voulu le publier par parties, successivement, on ne peut douter, vu son application au travail et sa longue carrière, qu’il ne fut parvenu à le réaliser. La seconde édition des Familles était réellement l’encyclopédie de la botanique. Sa classification des coquilles du Sénégal démontre qu’il était en état de traiter tout le règne animal d’une manière aussi complète. Quant aux, autres sciences, il est certain que, malgré l’étendue de ses connaissances, il y aurait eu de la témérité de sa part de prétendre les tirer de son propre fonds : aussi n’était-ce pas son intention, et l’état même de ses manuscrits le prouve. C’étaient des cadres dans lesquels il voulait enchâsser les matériaux pris ailleurs. Il ne fut pas découragé par ce défaut de succès, et il continua à augmenter ses matériaux. Chaque année, il croyait atteindre au terme ; cependant il ne publia plus aucun ouvrage considérable. Il se borna à donner à l’Académie des sciences un petit nombre de mémoires, dont l’importance et le mérite font regretter ce qu’il ne publia pas. C’est ainsi qu’en 1766, il traita la grande question de savoir si les espèces des plantes changent par le mélange des poussières des étamines, ou si elles sont invariables. Il avait, d’après Linné, adopté la première opinion dans ses Familles des Plantes : mais de nombreuses observations lui prouvèrent le contraire. En 1767, il avait observé des plantes aquatiques, auxquelles il donna le nom de tremella, et qui paraissent avoir des mouvements spontanés. Ce n’est que depuis peu que des naturalistes les ont observées de nouveau, et ont confirmé ses découvertes. Il publia, en 1767, des observations sur les ravages de l’hiver précédent ; par là, il fit connaître avec un peu de détail sa manière d’observer les phénomènes météorologiques. Enfin, en 1773, il fut chargé de faire les articles de botanique concevant les végétaux exotiques, pour le Supplément de l’Encyclopédie. La botanique avait été extrêmement négligée dans cet ouvrage, et, pour réparer ce défaut, on l’avait choisi avec le baron de Tschoudi ; celui-ci se chargea des arbres indigènes et de ceux qui sont naturalisés. Rien du plus opposé que la marche de ces deux collaborateurs. Tschoudi s’était beaucoup occupé de la culture des arbres et arbustes de pleine terre ; il intéresse par des phrases brillantes, qui couvrirent le peu de profondeur de ses connaissances. Adanson y mit, au contraire, tout l’appareil de l’érudition ; chacun de ses articles fut un traité complet de la plante qui en est le sujet. Il donna encore par là l’idée de la manière dont il voulait traiter l’universalité des plantes ; mais cette extension était inconciliable avec les limites dans lesquelles il fallait se renfermer, et les éditeurs l’arrêtèrent à la quatrième lettre. Dans quelques autres mémoires, Adanson fit connaître l’étendue et la variété de ses connaissances, d’abord en faisant l’histoire des tarets, ou des vers destructeurs des navires ; ensuite en indiquant l’électricité comme la cause de la commotion que font sentir certains poissons, la torpille et le gymnotus. Il fut aussi le premier qui annonça la propriété de la tourmaline : ce