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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 1.djvu/39

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ABA

1750, 2 vol. in-4o, t. 2, p. 380, et 4 vol. in-12, t. 4, p. 157, plusieurs dissertations latines, dans lesquelles Abauzit explique quelques inscriptions difficiles. Il a aussi donné, dans le Journal helvétique de 1743, une dissertation sur un bouclier votif qui avait été trouvé dans l’Arve, près de Genève, en 1721, sur lequel on à gravé une allocution et une largesse de l’empereur Valentinien II. Scipion Maffel a adressé à Abauzit la dixième lettre du recueil intitulé : Galliæ antiquates quœdam selectas, Paris, 1733, in-4o, dans laquelle il lui communique les corrections qu’il a eu occasion de faire au texte de plusieurs inscriptions fautivement rapportées par Gruter dans son grand recueil. Enfin, Abauzit, sans vouloir embrasser l’état ecclésiastique, s’était beaucoup occupé de théologie ; il était surtout très-versé dans la critique sacrée, et fut souvent consulté par les théologiens sur les passages les plus difficiles. Sa philosophie était principalement fondée sur les principes d’un pur socinianisme. On a de lui plusieurs traites qui ont été publiés après sa mort par Vegobre, sous ce titre : Œuvres diverse de M. Firmin Abauzit, contenant ses écrits l’histoire, de critique et de théologie, Genève, 1770 : il n’en a parti que le premier volume ; Bérenger en a donné une édition plus complète : Œuvres de feu M. Abauzit, Londres (Hollande), 1773, 2 vol. in-8o. Le premier recueil ne contient que huit dissertations sur la religion naturelle et la révélation judaïques ; sur les Épitres de St. Paul aux Romains et aux Galates ; sur l’idolâtrie ; sur l’eucharistie ; sur l’Apocalypse ; sur la controverse, et une explication des ch. 11 et 12 de Daniel. Les éditeurs du second recueil n’ont donné de ces pièces que les Réflexions sur l’eucharistie et sur l’idolâtrie, et l’Essai sur l’Apocalypse, contre l’orthodoxie duquel Vincent Fassini écrivit en 1778, et qui a été aussi l’objet de la critique de Bergier, dans son Traité historique et dogmatique de la religion, t. 8. Ils y ont joint les Réflexions sur les mystères de la religion, des explications de plusieurs passages obscurs de l’Ancien et du Nouveau Testament ; des dissertations sur la connaissance de Jésus-Christ, sur l’honneur du à Jésus-Christ, sur le Saint-Esprit[1] ; et plusieurs dissertations sur des points de littérature et d’antiquités ; tels que sur cette question : S’il est vrai que Virgile ait fait à la fin de sa vie, quelques changements à l’Enéide ; sur quelques méprises du dictionnaire de la Martinière ; sur les aurores boréales : sur le disque d’argent trouvé prés de Genève ; les ruines de Pœstum : le camp de Galba ; les monuments d’Aix, en Savoie ; un prétendu écu d’or du prince de Condé, 1587 ; sur les réductions du calendrier ; sur le passage des Alpes par Annibal ; des lettres sur différents sujets. Les meilleures productions d’Abauzit sont ses additions, dissertations, corrections, notes, plans, carte des environs du lac Léman, qui ornent l’édition de l’Histoire de Genève, de 1730. Il a laissé des dissertations manuscrites sur les éclipses de lune ; sur la pesanteur ; sur les Bacchides et sur Casina de Plaute ; sur l’antiquité des Assyriens, etc ; mais, la plupart de ces manuscrits ont été brûlés à Uzès par le zèle religieux de ses héritiers (voy. Bauyn ci-après), et il n’en existe plus qu’une correspondance avec un de ses oncles, ministre protestant, sur des questions de théologie et de sciences. Abauzit n’était pas moins recommandable par son caractère que par l’étendue de ses connaissances. Il était religieux par principes, et chrétien par conviction ; il ne blâmait jamais les autres de penser autrement que lui. Labarpe a dit qu’il était respectable par une longue carrière, passée tout entière dans les études de la philosophie et dans l’exercice de toutes les vertus ; un trait suffira pour donner une idée de son extrême douceur. Il passait pour ne s’être jamais mis en colère : quelques personnes s’adressèrent à sa servante pour s’assurer s’il méritait cet éloge. Il y avait trente ans qu’elle était à son service : elle affirma que pendant tout ce temps elle ne l’avait jamais vu en colère. On lui promit une somme d’argent si elle pouvait parvenir à le fâcher ; elle y consentit ; et, sachant qu’il aimait à être bien couché, elle ne fit pas son lit. Abauzit s’en aperçut, et le lendemain matin lui en fit l’observation. Elle répondit qu’elle l’avait oublie : il ne dit rien de plus. Le soir, le lit n’était pas fait : même observation le lendemain ; elle y répondit par une excuse vague, et encore plus mauvaise que la première. Enfin, à la troisième fois il lui dit : « Vous n’avez pas encore fait mon lit : apparemment que vous avez pris votre parti la-dessus, et que cela vous parait trop fatigant ; mais après tout il n’y a pas grand mal, car je commence à m’y faire. » Attendrie par tant de patience et de bonté, la servante lui demanda pardon, et lui avoua l’épreuve à laquelle on avait voulu mettre son caractère. A. L. M.


ABAZA, pacha de Bosnie, tirait son origine du pays des Abares ; il est célèbre dans l’histoire ottomane par sa bravoure, ses talents, et les circonstances extraordinaires dans lesquelles il s’est trouvé. Il se, lit connaître vers l’an de l’hégire 1033 (1623 de J.-C.). Après la mort du malheureux Othman II, Abaza, pacha d’Erzeroum, leva l’étendard de la rébellion, sous prétexte de venger le jeune prince que les janissaires avaient fait périr. Tous les pachas envoyés contre lui, partageant en secret sa haine, cherchèrent plutôt à le favoriser qu’à le détruire. Aussi ne doit-on pas s’étonner des grands progrès que fit la révolte d’Abaza sous Mustapha Ier, qui ne gouvernait que de nom, et sous Amurath (Mourad) IV, trop jeune encore pour se faire craindre. Des milliers de janissaires, dans les provinces asiatiques, étaient tombés sous les coups de ce terrible ennemi. Les janissaires demandèrent à grands cris à marcher contre lui ; trois grands vizirs l’attaquèrent inutilement. Enfin Khosrou-Pacha le rejeta dans Erzroum ; et le força de se rendre prisonnier, en 1623, après une résistance de cinq jours. Abaza, charge de chaînes, fut amené aux pieds d’Amurath IV ; le sultan lui pardonna, et, non content de lui laisser la vie, il le fit beyglerbeyg de la Bosnie. Cet exemple de clémence, uni-

  1. On cite de Firmin Abauzit un livre dangereux sous ce titre : Réflexions importantes sur les Évangiles (Voy. Esprit des Journaux, mai 1778)