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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 1.djvu/674

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furent égorgés, trainés en esclavage, ou livrés aux plus affreux tourments. Péréiaslaf ayant osé faire quelque résistance, cette capitale fut traitée avec tant de cruauté, qu’il n’y resta presque plus d’habitants (1282). Les Mogols se retirèrent enfin, et Démétrius revint à Péréiaslaf, d’où il leva des troupes pour tirer vengeance de ces attentats. André implora de nouveau le secours des Mogols, qui saisirent avec joie cette seconde occasion de ravager la grande principauté, où ils mirent encore tout à feu et à sang. Démétrius, de son côté, alla se jeter dans les bras de Nogaï, qui commandait dans les steppes formant aujourd’hui les gouvernements de l’Ukraine et d’Ekatérinoslaf. C’est ainsi que ces malheureux princes ruses sacrifiaient la patrie à l’ambition, en se courbant lâchement aux pieds de leurs plus cruels ennemis. Nogaï se déclara pour Démétrius, avec lequel André se réconcilia en apparence. Cependant celui-ci, ayant attiré à son parti quelques autres princes, alla trouver Nogaï, qu’il indisposa facilement contre son frère. Ce chef barbare confia ses hordes à André, qui leur servit de guide. Démétrius effrayé s’enfuit à Pskof, laissant la grande principauté à son frère. Quoique les Tatars n’eussent aucune raison de se conduire en ennemis, puisque personne ne leur résistait, ils traitèrent les villes et les campagnes comme dans leurs incursions précédentes. Ils ne trouvèrent personne à Pérèiaslaf, les habitants ayant en le temps de se réfugier dans les forêts. Les barbares se retirèrent charges de butin. Démétrius, accablé de chagrin, mourut en 1294, laissant à son frère la première place dans l’empire. Les deux premières années se passèrent assez tranquillement ; mais des discussions s’étant élevées entre André et ses neveux, ils se rendirent à la horde pour y plaider leur cause. Le kan nomma un juge. En présence de ce délègue, les princes russes en vinrent aux mains, et si les évêques qui les accompagnaient ne s’étaient jetés au milieu d’eux, ils se seraient égorgés (1297). Cependant on fit un arrangement qui fut rompu en 1302 à la mort de Daniel, duc de Moscou. Ce prince avait fondé et embelli cette ville qui, après la chute de Kiow, devait être la seconde capitale de l’empire. André, désirant la réunir à ses domaines, se rendit à la horde ; après y avoir séjourné et intrigué lâchement pendant une année (1303), il revint avec des ambassadeurs du grand kan qui ordonnait aux princes russes de mettre un terme à leurs dissensions, et de se contenter chacun de ce qui lui appartenait. Les Suédois avaient fondé Wiborg en Carélie, et, pénétrant dans la Néway, ils avaient bâti à l’embouchure de l’Okhta une forteresse qu’ils avaient nommée Landskron. Cette place inquiétait le commerce des Nowogorodiens, qui supplièrent André de venir à leur secours. La place fut enlevée et rasée. Le grand-duc mourut le 27 juillet 1304. Ce fils indigne du grand Alexandre Newski fut enterré à Gorodetz, sur le Volga, disent les annales russes, loin des cendres sacrées de son père. ’ G-y.


ANDRÉ (l’abbé), ex-oratorien, né à Marseille, ancien bibliothécaire du chancelier d’Aguesseau, passa quelques années de sa vie dans la congrégation de l’Oratoire, mais n’y reçut aucun des ordres sacrés[1]. Sa modestie fut si grande qu’aucun des ouvrages qu’il a fait ou publiés ne porte son nom. Voici la liste de ceux qui lui sont attribués : 1° Lettre à l’abbé Prévost, concernant les missions du Paraguay, 1758, in-12. 2° La divinité de la religion chrétienne vengée des sophismes de J.-J.Rousseau, Paris, 1763, 2 parties in-12. La première partie est seule d’André ; la seconde fut l’ouvrage de D. Deforis. La première partie avait paru en 1762 sous le titre de Réfutation du nouvel ouvrage de J.-J. Rousseau, intitulé : Émile, etc. ; in-8o et in-12. 3° L’esprit de M. Duguet, ou Précis de la morale chrétienne, tirée de ses ouvrages. Paris, 1764., in-12. 4° La morale de l’évangile en forme d’élévation, à Dieu, ou la Religion du cœur, avec le tableau des vertus chrétiennes d’un grand magistrat (le chancelier d’Aguesseau ), Paris, 1786, 3 vol. in-12. 5° C’est aux soins d’André que l’on doit la publication des œuvres de ce grand magistrat, Paris, 1759-1790, 13 vol. in-4o. 6° Une nouvelle édition des Pensées de Pascal, augmentée d’un grand nombre de pensées qui sont tirées du recueil de ses œuvres, avec une table,etc., Paris, 1783, in-12. 7° Lettre à l’auteur des Lettres pacifiques (sans date), in-12. (Voy. le Dictionnaire des anonymes.). C. T-y.


ANDRÉ (claude), né à Montluel le 30 mai 1743, fils d’un marchand de blé de cette petite ville de la Bresse, se consacra de bonne heure à l’état ecclésiastique. Modeste et sans ambition, il était destiné, si la révolution ne fût pas venue, à passer sa vie paisiblement au dernier rang du clergé. Chanoine à la cathédrale de Troyes en 1801,la faveur dont jouissait son frère auprès du gouvernement consulaire (voy. l’art, ci-après) le fit nommer évêque de Quimper. Arrivé dans cette ville,il s’y montra peu disposé à fléchir devant toutes les exigences du nouveau gouvernement, et en 1802 donna sa démission à la suite de quelques démêlés qu’il eut avec le préfet du Finistère. On le nomma alors chanoine de Saint-Denis, avec le traitement d’évêque, et il vécut en paix dans ses nouvelles fonctions, pratiquant avec une grande sévérité toutes les vertus de son état jusqu’à sa mort qui eut lieu le 25 août

  1. En 1175, il présenta à Malesherbes, alors ministre del maison du roi, un mémoire, ou, après avoir dit que la partie de la littérature qu’il avait jadis le plus cultivée était la bibliographie, il demandait une place d’adjoint aux deux gardes de la bibliothèque du roi, pour accélérer la confections du catalogue, dont le dixième volume, qui est le dernier, avait paru en 1753. « Il est certain, disait-il, que les deux gardes de la bibliothèque, sans cesse distrait par les fonctions de leur emploi, ne peuvent, quelque laborieux qu’on les suppose, suffire à ce travail ; et que, s’ils ne sont pas aidés, on ne verra pas d’ici à un très-grand nombre d’années la fin de cet ouvrage. (On ne l’a pas encore vue, et plus de soixante ans se sont écoulés…) Or, toutes les richesses que ce magnifique dépôt renferme resteront comme enfouies tant qu’on n’aura pas un catalogue exact qui les fasse connaître, et qui mette les savants à portée d’en faire usage. » Les siècles s’écoulent, et nos grandes bibliothèques n’ont pas encore de catalogue par ordre de matières, parce que, comme le disait Mirabeau : « En France, on ne regarde pas si la cheville va au tru, on commence par l’y mettre. » André ne fut pas entendu. V-VE