Page:Michelet - Œuvres complètes Vico.djvu/148

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persécutions égarèrent la raison du malheureux Cuoco, il détruisit un travail fort remarquable, dit-on, sur le système de la Science nouvelle.

L’infortuné Mario Pagano (né en 1750, mort en 1800) est de tous les publicistes celui qui a suivi de plus près les traces de Vico. Mais, quel que soit son talent, on peut dire que, dans ses Saggi politici, les idées de Vico ont autant perdu en originalité que gagné en clarté. Il ne fait point marcher de front, comme Vico, l’histoire des religions, des gouvernements, des lois, des mœurs, de la poésie, etc. Le caractère religieux de la Science nouvelle a disparu. Les explications physiologiques qu’il donne à plusieurs phénomènes sociaux ôtent au système sa grandeur et sa poésie, sans l’appuyer sur une base plus solide. Néanmoins les Essais politiques sont encore le meilleur commentaire de la Science nouvelle. Voici les points principaux dans lesquels il s’en écarte. 1° Il pense avec raison que la seconde barbarie, celle du moyen âge, n’a pas été aussi semblable à la première que Vico paraît le croire. 2° Il estime davantage la sagesse orientale. 3° Il ne croit pas que tous les hommes après le déluge soient tombés dans un état de brutalité complète. 4° Il explique l’origine des mariages, non par un sentiment religieux, mais par la jalousie. Les plus forts auraient enlevé les plus belles, auraient ainsi formé les premières familles et fondé la première noblesse. 5° Il croit qu’à l’origine de la société les hommes furent, non pas agriculteurs, comme l’ont cru Vico et Rousseau, mais chasseurs et pasteurs.

Chez tous les écrivains que nous venons d’énumérer, les idées de Vico sont plus ou moins modifiées par l’esprit français du dernier siècle. Un philosophe de nos jours me semble mieux mériter le titre de disciple légitime de Vico. C’est M. Cataldo Jannelli, employé à la bibliothèque royale de Naples, qui a publié, en 1817, un ouvrage intitulé : Essai sur la nature et la nécessité de la science des choses et histoires humaines. Nous n’entreprendrons pas de juger ce livre remarquable. Nous observerons seulement que l’auteur ne semble pas tenir assez de compte de la perfectibilité de l’homme. Il compare trop rigoureusement l’humanité à un individu, et croit qu’elle aura sa vieillesse comme sa jeunesse et sa virilité (page 58).


Il ne nous reste qu’à donner la liste des principaux auteurs français, anglais et allemands qui ont écrit sur la philosophie de l’histoire. Lorsque nous n’étions pas sûr d’indiquer avec exacti-