Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/141

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dépendre de nous ; nous périrons plutôt que d’abandonner nos époux, amants, fils et frères… »

Ô France, vous êtes sauvée ! ô monde, vous êtes sauvé !… Je revois au ciel ma jeune lueur, où j’espérai si longtemps, la lumière de Jeanne d’Arc… Que m’importe que de fille elle soit devenue un jeune homme, Hoche, Marceau, Joubert ou Kléber !

Grande époque, moment sublime, où les plus guerriers des hommes sont pourtant les hommes de paix ! où le Droit, si longtemps pleuré, se retrouve à la fin des temps, où la Grâce, au nom de laquelle la tyrannie nous écrasa, se retrouve concordante, identique à la Justice !

Qu’est-ce que l’ancien régime, le roi, le prêtre dans la vieille monarchie ? La tyrannie au nom de la Grâce.

Qu’est-ce que la Révolution ? La réaction de l’équité, l’avènement tardif de la Justice éternelle.

Justice, ma mère, Droit, mon père, qui ne faites qu’un avec Dieu…

Car, de qui me réclamerai-je, moi, un de la foule, un de ceux qui naquirent dix millions d’hommes, et qui ne seraient jamais nés sans notre Révolution ?

Pardonnez-moi, ô Justice, je vous ai crue austère et dure, et je n’ai pas vu plus tôt que vous étiez la même chose que l’Amour et que la Grâce… Et voilà pourquoi j’ai été faible pour le Moyen-âge, qui répétait ce mot d’Amour sans faire les œuvres de l’amour.

Aujourd’hui, rentré en moi-même, le cœur plus