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contre la cour et les ministres la vengeance de Dieu et des hommes… « Des têtes ! dit Mirabeau, il nous faut M. de Broglie[1]. »

Une députation de l’Assemblée va trouver le roi et n’en tire que deux paroles équivoques : il envoie des officiers pour prendre le commandement de la milice bourgeoise… Il ordonne aux troupes du Champ de Mars de se replier… Mouvement très bien entendu pour l’attaque générale.

Indignation de l’Assemblée, clameur, envoi d’une seconde députation… « Le cœur du roi est déchiré, mais il ne peut rien de plus. »

Louis XVI, dont on a si souvent déploré la faiblesse, avait ici les apparences d’une fermeté déplorable. Berthier était venu près de lui ; il était dans son cabinet, l’affermissait[2], lui disait que le mal était peu de chose. Dans le trouble où était Paris, il y avait encore des chances pour la grande attaque du soir. Cependant on sut bientôt que la ville était sur ses gardes. Elle avait déjà placé des canons sur Montmartre, qui couvraient La Villette, tenaient en respect Saint-Denis.

Parmi les rapports contradictoires, le roi ne donna nul ordre et, fidèle à ses habitudes, alla se coucher de bonne heure. Le duc de Liancourt, qui, par le droit de sa charge, entrait toujours, même de nuit, ne put le voir périr ainsi, dans son apathie et son ignorance. Il entra, il l’éveilla. Il aimait le roi et il

  1. Ferrières, I, 132.
  2. Rapport d’accusation, Hist. parl., IV, 83.