Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/379

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principal d’une compagnie d’accapareurs, se tua ou fut tué dans une forêt voisine de Paris. Sa mort entraîna sa banqueroute, immense, effroyable, de plus de cinquante millions. Il n’est pas invraisemblable que la cour, qui avait de grandes sommes placées chez lui, les retira brusquement pour solder une foule d’officiers qu’elle appelait à Versailles, peut-être pour emporter à Metz ; elle ne pouvait sans argent commencer la guerre civile.

C’était déjà une guerre contre Paris, et la pire peut-être, que de le retenir dans une telle paix. Plus de travail, et la faim !

« Je voyais, dit Bailly, de bons marchands, des merciers, des orfèvres, qui sollicitaient pour être admis parmi les mendiants qu’on occupait à Montmartre à remuer de la terre. Qu’on juge de ce que je souffrais. » Il ne souffrait pas assez. On le voit, dans ses Mémoires mêmes, trop occupé de petites vanités, de questions de préséance, de savoir par quelle forme honorifique commencera le sermon de la bénédiction des drapeaux, etc.

Et l’Assemblée nationale ne souffrait pas assez non plus des souffrances du peuple. Autrement elle eût moins traîné dans l’éternel débat de sa scolastique politique. Elle eût compris qu’elle devait hâter le mouvement des réformes, écarter tous les obstacles, abréger ce mortel passage où la France restait entre l’ordre ancien et l’ordre nouveau. Tout le monde voyait la question, l’Assemblée ne la voyait pas. Avec des intentions généralement bonnes et de grandes