Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/134

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parler comme Froissart) devant cette bête sauvage ; mais, en reculant, ils l’autorisaient. Il était trop facile à Marat, à Fréron, le faux Marat, de prédire les pas rétrogrades que faisaient les royalistes bâtards dans leur retraite inconséquente. Alors on criait : « Miracle ! Marat l’avait dit ! vrai prophète ! » — Ainsi le fou furieux semblait être le seul sage.

L’Américain Morris prétend qu’à ce moment toute chose était impossible, et la royauté, et la régence, et la république. Non, tout était difficile. La France avait été dans un moment au moins aussi difficile dans l’hiver de 1789 et 1790 ; elle fut alors sans lois, ni anciennes ni nouvelles ; elle vécut de son instinct. Il pouvait la sauver encore. Le roi, ses frères et d’Orléans, se trouvant également perdus dans l’opinion, la régence n’étant possible que par un conseil de députés, un comité républicain, mieux valait une forme plus franche, point de régence, et la république. Difficulté pour difficulté, la préférence devait être pour le gouvernement qui, après tout, est le seul qui soit naturel, le gouvernement de soi par soi-même, celui auquel l’homme arrive dès qu’il échappe à la fatalité, atteint sa libre nature. On sentira de plus en plus, à mesure qu’on avancera dans la longue vie du monde, dans l’expérience politique qui commence à peine, que la monarchie n’a été qu’un gouvernement d’exception, un provisoire de salut public, approprié aux peuples enfants.

La presse violente d’une part, les Marat et les