Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/143

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L’Assemblée était bien vieille pour montrer cette verdeur ; vieille d’années, d’événements, finie dans l’opinion. Composée bizarrement au caprice des institutions gothiques, issue en bonne partie de ce Moyen-âge qu’elle avait détruit, elle portait en elle une contradiction intrinsèque qui faisait toujours douter de la légalité de ses actes. Adversaire du privilège, elle n’en était pas moins, pour la moitié de ses membres, la fille du privilège. Trois cents de ces privilégiés qui avaient protesté pour le roi, en même temps que Bouillé, ils siégeaient encore. Une Assemblée formée ainsi, et qui comptait dans son sein ces amis de l’ennemi, était-elle bien cette haute et pure image de la loi, devant laquelle, sous peine de mort, le peuple dût s’incliner ?

Il y avait audace, imprudence, mépris de l’opinion, à pousser ainsi des paroles aux actes. Des passions très violentes étaient au fond de tout ceci : l’ulcération des vanités pour Duport, Lameth, pour les constitutionnels ; pour Barnave et autres que la reine flattait de l’espoir de sa confiance, une ambition romanesque, quelques idées de jeunesse, que le plus froid, à vingt-huit ans, n’étouffe jamais. Ces hommes, si différents par les formes de ceux de la Convention, se payaient de la même idée, qui tue les scrupules : « La nécessité d’État, le salut public. » — Et cette autre idée d’orgueil : « Le droit est en nous. »

Au matin (le 16 juillet), Pétion et autres, se rendant aux Jacobins pour lire la pétition, trouvent la