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LES VENDÉENNES EN 90 ET 91

nœud de la famille, met l’homme d’un côté, la femme de l’autre.

Cette chose tragique et douloureuse apparut vers 92. Soit amour du passé, force des habitudes, soit faiblesse de cœur et pitié trop naturelle pour les victimes de la Révolution, soit enfin dévotion et dépendance des prêtres, la femme devenait l’avocat de la contre-révolution.

C’était sur le terrain matériel de l’acquisition des biens nationaux que se posait généralement la dispute morale entre l’homme et la femme.

Question matérielle ? On peut dire oui et non.

D’abord, c’était la question de vie et de mort pour la Révolution. L’impôt ne rentrant pas, elle n’avait de ressource que dans la vente des biens nationaux. Si elle ne réalisait cette vente, elle était désarmée, livrée à l’invasion. Le salut de la révolution morale, la victoire des principes, tenait à la révolution financière.

Acheter, c’était un acte civique qui servait très directement le salut du pays. Acte de foi et d’espérance. C’était dire qu’on s’embarquait décidément sur le vaisseau de l’État en péril, qu’avec lui on voulait aborder ou périr. Le bon citoyen achetait, le mauvais citoyen empêchait d’acheter.

Empêcher, d’une part, la rentrée de l’impôt, de l’autre, la vente des biens nationaux, couper les vivres à la Révolution, la faire mourir de faim : voilà le plan très simple, très bien conçu, du parti ecclésiastique.

Le noble amenait l’étranger, et le prêtre empêchait qu’on ne pût se défendre. L’un poignardait la France, l’autre la désarmait.

Par quoi le prêtre arrêtait-il le mouvement de la