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LES FEMMES DE LA RÉVOLUTION

lutionnaire, et s’inquiétait médiocrement si les coups ne tomberaient pas sur l’auguste maître de l’ambassadeur de Suède.

Le 11 janvier, Narbonne, ayant, dans un voyage rapide, parcouru les frontières, vint rendre compte à l’Assemblée. Vrai compte de courtisan. Soit précipitation, soit ignorance, il fit un tableau splendide de notre situation militaire, donna des chiffres énormes de troupes, des exagérations de toute espèce, qui, plus tard, furent pulvérisées par un Mémoire de Dumouriez.

La chute de M. de Narbonne, renversé par les Girondins, rendit tout à coup Mme de Staël zélée royaliste. Elle rédigea un plan d’évasion pour la famille royale. Mais elle voulait que Narbonne, son héros, en eût l’honneur. La cour ne crut pas pouvoir se fier à des mains si légères. Réfugiée en Suisse pendant la Terreur, après Thermidor partisan aveugle de la réaction, elle change brusquement en 96, appuie le Directoire et participe indirectement au coup d’État qui sauva la République.

Bonaparte la haïssait, croyant qu’elle avait aidé Necker dans ses derniers ouvrages, fort contraires à sa politique. Il n’a pas trouvé de meilleur moyen de la dénigrer que de dire qu’elle lui avait fait je ne sais quelle déclaration d’amour ; chose infiniment peu probable à l’époque où elle était toute livrée à Benjamin Constant, qu’elle lança dans l’opposition contre Bonaparte. On sait les persécutions ridicules du maître de l’Europe, l’exil de Mme de Staël, la saisie de son Allemagne, et les étranges