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Page:Mille - Anthologie des humoristes français contemporains, 1920.djvu/154

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ANTHOLOGIE DES HUMORISTES

Plusieurs voix. — Ne poussez donc pas comme ça.

Le monsieur en casquette. — Comment donc voulez-vous que je pousse, alors ?

Une voix. — Ne poussez pas du tout.

Autre voix. — Oh ! comme les fusées filent, on dirait qu’elles vont plus haut que la lune.

Le moutard. — Elles passent à travers, il y a des trous.

Une voix. — Voici la grande pièce.

Le moutard. — Minute ! je vas prendre ma longue-vue. (Il place devant ses yeux sa main arrondie en cornet.) Attention ! j’vas faire l’explication : Ça représente la prise de Sébastopol. Je vois Edmond Galland habillé en général…

La dame. — Mais, monsieur, vous me… poussez !

Le moutard. — C’est le bouquet.

Une voix. — Il doit y avoir encore d’autres choses.

Le moutard. — N, i, ni, c’est fini. Vu ma longue-vue, je n’ai rien vu.

Un monsieur (à sa femme). — Très joli ; allons-nous-en avant que la foule devienne plus compacte.

Le moutard. — Un instant, que personne ne sorte ! En v’là pour nos cinquante mille francs ; nous sommes ici un million, ça fait cinq centimes pour chacun ; ceux qui voudront payer pour les Polonais n’ont qu’à le dire.

Le monsieur. — Jeune homme, vous comptez très bien : voici dix centimes pour mon épouse et pour moi, plus dix sous pour la malheureuse Pologne.

Le moutard. — Dieu, mon bourgeois, vous donne un beau trépas !

(Le 101e Régiment ; Calmann-Lévy édit.)