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Page:Mille - Anthologie des humoristes français contemporains, 1920.djvu/73

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LOUIS DESNOYERS

jeunesse, qu’au moment même de son trépas il se portait parfaitement bien. Certainement, s’il ne fût pas mort, il eût vécu encore bien plus longtemps !

(Signes marqués de doute.)

« Or, messieurs et dames, la recette de ce précieux baume avait été perdue dans la suite des siècles. Tout se perd ici-bas. Il n’est aucun de vous, en effet, qui n’ait perdu en sa vie au moins quelque tabatière, quelque parapluie, quelque mouchoir de poche, quelque serin, que sais-je ?

(Assentiment non équivoque.)

« Mais si tout se perd, tout se retrouve. Pensée consolante, s’il en fut ! Quand je dis que tout se retrouve, j’en excepte naturellement les serins, les mouchoirs, les tabatières, et surtout les parapluies. Je ne veux parler que des idées. Les idées se retrouvent toujours : c’est ce qu’on appelle inventer. C’est ainsi qu’un hasard, que je ne crains pas d’appeler fortuit, a fait dernièrement retrouver cet élixir dans les déserts de l’Arabie Pétrée, où il obtient depuis ce moment un véritable succès de vogue…

« Le voici, messieurs et dames, ce remède étonnant qui a eu l’honneur de captiver les suffrages de l’Académie royale de médecine de Berlin. La preuve que je ne vous en impose pas, c’est que l’étiquette le dit, comme vous pouvez vous en convaincre.

(Approbation unanime.)

« Je ne m’arrêterai pas, du reste, à vous en faire l’éloge : je me contenterai de vous dire qu’il guérit de tout, même des maladies qu’on n’a pas encore.

(Murmure flatteur.)

« Oui, messieurs et dames, il guérit même d’a-