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Page:Mirages-Renée de Brimont-1919.djvu/45

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FEUILLES SUR L’EAU

Octobre a dispersé l’ambre, l’or et le sang,
et la rouille, et le cuivre pâle,
et devant la terrasse un râteau bruissant
rompt la grande paix automnale.

Ô ce bruit familier, rythmique, nonchalant !
Ô la fuite de mes pensées,
comme, sur ce chemin jonché de sables blancs
toutes ces feuilles dispersées !…

Ici l’étang voilé par des brumes, halo
qu’ont tramé d obscures fileuses…
Et l’horizon brouillé se confond avec l’eau
froide, dormante et nébuleuse ;

et les presles frileux, et les roseaux transis,
et les ajoncs à tête blanche
penchent sur l’eau dormante et nébuleuse, ainsi
qu’au bord de l’eau mon front se penche.

Sur cette eau, nul râteau râflant les feuilles d’or,
les feuilles de sang et de rouille,
feuilles, feuilles nageant dans leur petite mort,
feuilles sur l’eau, frêles dépouilles…