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Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/275

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IV


Le soir allait venir ; c’était la fin d’une douce journée d’avril. Mon oncle et moi, accoudés à la fenêtre de sa chambre, nous regardions. Il faisait grand jour encore, mais une lumière plus fine, plus décolorée, plus éteinte s’épandait sur la terre. Derrière le bois, léger, poudré de cendre verte, le soleil descendait ; et le ciel était sans un nuage, calme comme une mer d’été, d’une pâleur charmante qui s’avivait de rose au couchant. La vie renaissait, gonflait les branches de bourgeons prêts à éclater. Les arbres semblaient heureux d’étendre leurs ramures fécondées. Déjà un gainier étalait le rouge décor de ses fleurettes ; un marronnier, plus loin, poussait ses larges feuilles d’un vert attendri. Une senteur forte de germes montait du sol en travail d’amour ; sur un poirier, en face de nous, deux moineaux se poursuivaient, s’accouplaient, plumes emmêlées, ailes palpitantes.