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Page:Mirbeau - Théâtre II.djvu/88

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lement de respecter la loi… ou de la tourner… ce qui est la même chose…

Jean Guenille

J’entends bien… Oui… oui… Mais faut être riche pour ça…

Le Commissaire

Qu’est-ce que vous voulez ! C’est ainsi… (Faisant sauter dans sa main le portefeuille.)… Voilà ce portefeuille… D’accord… à votre place… et dans votre situation… il n’y en a peut-être pas beaucoup qui l’eussent rapporté ce portefeuille… J’en conviens… Je ne veux pas prétendre, remarquez, que vous ayez été un imbécile de le rapporter… Non… au contraire… vous avez manqué de prudence… d’opportunité… de réflexion… tout au plus. En somme, moralement parlant… votre action n’en est que plus méritoire… Elle est même digne d’une récompense… et cette récompense… que je ne juge pas inférieure à cent sous… vous l’aurez sans doute… dès que nous aurons retrouvé… si nous la retrouvons jamais… la personne à qui appartiennent ce portefeuille et les dix billets de mille francs qu’il contient… Oui… mais… légalement ?… Légalement… vous vous êtes mis dans un très mauvais cas…

Jean Guenille

J’entends bien… j’entends bien…

Le Commissaire, insistant.

Dans un très mauvais cas… Comprenez-moi… C’est pour l’avenir… Il n’existe pas, dans le Code ni ailleurs… un article de loi qui vous oblige à retrouver, dans la rue, la nuit, des portefeuilles garnis de billets de banque…