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donner sa faute. Vite il partit pour Séoul. Nous le verrons bientôt racheter son péché par le martyre. À la capitale, le 14 Février, des satellites se présentèrent à la maison de Mgr. Berneux, à deux reprises différentes, sous prétexte de percevoir une contribution pour le grand palais de 1 777 chambres que, dans sa folie des grandeurs, faisait construire le régent en pressurant le peuple. Cette double visite inspira des craintes aux chrétiens.


ARRESTATION DE Mgr. BERNEUX. — Vers la mi-février, deux typographes de la Mission, Tchoi Pierre et Tjyen Jean furent arrêtés à Séoul. Cette arrestation doit avoir eu lieu avant le 19 Février, comme en font foi les documents officiels coréens, que nous allons suivre dans ce récit, en les corroborant de détails que nous a laissés la tradition[1]. Le 19 Février, en effet, ces deux chrétiens ont déjà été examinés, interrogés et une première condamnation à mort est décrétée, mais en même temps un nouvel examen de leur cause est ordonné, à la requête du Ministère des Crimes. Le 25 Février, à la requête du Tribunal des Criminels d’État, un mandat d’arrestation est lancé contre le Mandarin Nam Jean-Baptiste, alors absent de la Capitale. Ce même jour, de la Préfecture de Police de gauche et de droite, arrive le rapport suivant :

« Le 23 Février, vers les 6 h. du soir, nous avons arrêté on ne sait quelle espèce d’individu étrange, haut de 7 à 8 pieds, il paraît avoir dépassé 50 ans ; les yeux sont profonds, le nez fort, il comprend notre langue : il était revêtu d’un habit long de drap doublé à l’intérieur d’une peau d’agneau ; il portait un gilet de toile de coton et un pantalon de même, et avait des souliers de satin à double piton[2] : c’étaient là évidemment des signes qui dénotent un étranger. Aussi nous l’avons examiné sévèrement et, à l’interrogatoire, il a répondu qu’il est originaire du royaume de France, il est entré dans le royaume de Corée dans le courant de l’année 1856, a voyagé ici et là à la capitale et en province pour répandre la religion[3]. »

  1. Les documents officiels, dont il s’agit ici, sont les Annales du Grand Conseil et le Journal de la Cour. Mgr. Mutel les a découverts en 1921-22 aux archives Coréennes, grâce à la bienveillance du Gouvernement Japonais, qui facilita toutes les recherches.
  2. Il s’agit de souliers chinois inconnus alors en Corée.
  3. C’est Mgr. Berneux, qui est ainsi désigné dans ce rapport.