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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/18

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LE GUEUX DE MER

savoir que Luther, Calvin et le prince d’Orange sont la cause de tous nos maux, et que la sainte inquisition en serait le meilleur remède. Toutes les personnes qui pensent bien sont d’accord là-dessus à l’Écluse.

Quelques instants après ce petit dialogue on aperçut une troupe de femmes et d’enfants, qui s’occupaient à recueillir des racines et des herbes sauvages pour subsister. Ces malheureux erraient çà et là, pâles, décharnés, couverts de haillons. Quoique mourant de besoin, ils ne pouvaient se résoudre à implorer le secours des passants, car ils avaient été accoutumés à vivre du produit d’un travail honorable, et la misère ne les avait point encore rendus insensibles à la honte ; seulement, quelques jeunes enfants s’approchaient de la voiture, et, joignant leurs petites mains, ils attendaient en silence qu’on leur jetât les aumônes qu’ils n’osaient demander.

Marguerite fit arrêter la voiture, et donna à ces malheureux tout l’argent qu’elle portait sur elle. — Demandez leur d’où vient leur misère, lui dit la baronne. Je voudrais bien les secourir ; mais je serais coupable de leur faire du bien, si c’étaient des hérétiques.

— Pauvres enfants, dit la jeune comtesse, n’avez-vous donc plus de pères ? êtes-vous tous orphelins ?

— Hélas ! bonne dame, répondirent-ils, nos pères et nos frères aînés sont en prison pour n’avoir pu