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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/364

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Quelles justes inquiétudes ne devait pas leur inspirer le séjour de Marguerite dans cette malheureuse ville ! Un serrement de main fut l’unique geste qui trahît leur anxiété, et sans avoir prononcé un seul mot, sans avoir échangé un seul regard, ils coururent à l’auberge où ils avaient laissé leurs chevaux, s’élancèrent dessus, et prirent la route du Brabant.

Ils arrivèrent au déclin du jour dans cette riche et populeuse cité de Gand, dont les habitants plus fiers, plus belliqueux et peut-être aussi plus féroces que les autres Flamands, semblaient avoir une origine différente. À leur stature robuste et à leur regard assuré il était facile de reconnaître en eux les descendants de cette race indomptable qui avaient bravé vingt fois toutes les forces des ducs de Bourgogne et des rois de France. De nombreux trophées de leurs anciennes victoires s’élevaient dans leurs murs ; mais la citadelle construite par Charles-Quint pour les maîtriser, et la corde que leurs magistrats étaient condamnés à porter autour du cou, étaient des monuments honteux de leur dernière défaite.

Les voyageurs prirent à peine le temps de changer de chevaux, et continuèrent leur route vers Bruxelles ; cependant ils n’entrèrent point dans cette dernière ville, mais, la laissant sur la droite, ils se dirigèrent sur Malines.

Il était deux heures du matin, et les cavaliers, qui n’avaient encore pris aucun repos, sentaient leurs chevaux épuisés près de tomber de lassitude. La