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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/409

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l’amant, enlevé à son amante éperdue, fut traîné par les gardes jusqu’au palais du gouvernement.

On lui fit traverser les galeries où jadis un ami l’avait amené ; on le conduisit au cabinet où il avait reçu les ordres du duc d’Albe, et on l’y laissa seul, en proie à des angoisses mortelles, mais soutenu par son courage et par la conscience d’avoir toujours fait son devoir.

Ma perte est certaine, se disait-il, et Marguerite n’y survivra point ; mais Dieu est juste, et un autre monde nous réunira.

Un poignard de Tolède à la lame large, à la pointe acérée, paraissait avoir été oublié sur un des sièges qui se trouvaient dans le cabinet. Le captif s’en saisit avec empressement, et murmura le mot de vengeance ! non qu’il fût capable de punir un crime ; mais si l’ennemi de son pays s’offrait à ses regards il pourrait peut-être le contraindre à se défendre.

La porte s’ouvrit et le duc d’Albe parut. Le jeune homme serra fortement le manche de son poignard qu’il avait caché dans sa ceinture ; mais quand il vit le fier Espagnol entrer seul et sans méfiance, sa main lâcha l’arme meurtrière.

Un an s’était écoulé depuis que Louis de Winchestre avait vu Ferdinand de Tolède, et cette année avait presque rendu méconnaissable l’homme qui gouvernait les Pays-Bas. Car, malgré le succès momentané de ses armes, ses ennemis vaincus avaient puisé de nouvelles forces dans leurs défaites, et ils avaient repris le dessus dans les Pays-Bas comme ses envieux à Madrid. Pour prix de ses