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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/63

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LE GUEUX DE MER

les Belges ont versé pour la famille de leurs souverains, les trésors qu’ils ont prodigués pour Charles-Quint et pour son fils ! quel sera le prix d’un dévouement sans exemple, si des soldats étrangers peuvent impunément leur ravir leurs épouses et leurs filles ! Et vous vous appelez les champions de la religion ! Dites plutôt les satellites de l’enfer !

Tandis que la douairière exhalait ainsi son courroux, et que Dirk Dirkensen, qui l’écoutait avec une vive satisfaction, faisait une grimace de plaisir à chaque nouvelle apostrophe, Marguerite, à qui le mouvement avait fait reprendre connaissance, osait à peine jeter un regard timide sur son libérateur ; elle savait qu’il devait la croire injuste et infidèle : mais, quelque douloureuse que fût cette pensée, elle se réjouissait de lui devoir la vie comme d’un nouveau lien qui l’unissait à lui.

Persuadé que la jeune comtesse le haïssait comme un rebelle et un fils dénaturé, Louis de Winchestre avait pris la résolution d’étouffer l’amour qu’il ressentait encore pour elle. Il se tenait donc debout, la sonde à la main, et feignait de s’occuper uniquement de découvrir la profondeur des eaux ; mais, sans y songer, il retournait peu à peu la tête du côté de Marguerite, et bientôt leurs regards se rencontrèrent.

Soupçons, peines, regrets, tout fut oublié dans un moment ; le jeune homme lut dans les yeux de sa bien-aimée l’assurance d’un amour durable et sans partage : il retrouvait Marguerite telle qu’aux jours