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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/96

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qui n’enviât l’honneur d’accompagner le nouveau capitaine. Quatre seulement en obtinrent la permission ; ils s’élancèrent dans le frêle esquif, le jeune officier les suivit, et ils s’éloignèrent à force de rames, emportant avec eux les vœux de tous ceux qui se trouvaient sur le flibot.

Le vaisseau espagnol restait isolé sur le banc où il avait brisé sa proue. Les navires qui le suivaient avaient viré de bord pour s’éloigner des bas-fonds, et personne ne songeait à secourir l’amiral. Il avait aussi perdu sa chaloupe par l’indiscipline de quelques matelots qui s’y étaient jetés à la hâte, laissant leurs chefs et leurs camarades se tirer d’affaire comme ils le pourraient. Dans cette extrémité, le duc, conservant son courage et sa présence d’esprit, avait fait jeter dans la mer tous les riches bagages qui encombraient le bâtiment. Il faisait boucher les voies d’eau et pomper sans relâche. Lui-même se mêlait aux travailleurs, les animant par son exemple, et, grâce à ses efforts, le vaisseau paraissait près de se relever.

Déjà les Espagnols reprenaient courage quand, à travers la fumée épaisse qui environnait le navire, ceux qui se trouvaient à la poupe aperçurent un petit canot qui n’était plus qu’à une demi-portée de fusil. Qui êtes-vous, braves gens ? cria le capitaine aux marins qui montaient cette frêle embarcation ; pourquoi venez-vous ?

Le jeune officier debout à l’avant du canot le laissa répéter deux fois sa question ; voyant enfin qu’on se préparait à faire feu sur lui, il répondit d’une voix