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Page:Monge - Coeur magnanime, 1908.djvu/149

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UNE ŒUVRE D’ARTISTE

œuvre fut une prédication vivante ; point d’exagération cependant ; la tête du Christ admirablement belle reflétait, en même temps qu’une indicible douleur, une douceur indéfinissable, telle qu’elle convenait au Grand Martyr volontaire !

Le vieux sculpteur, de temps à autre, venait s’asseoir à l’atelier et contempler son jeune élève qui ciselait ; il ne conseillait plus ; Benoit, à cette heure, l’avait surpassé ; mais, chose étonnante, il ne lui parlait plus de lui succéder !

L’ouverture du Salon approchait. Sur le désir de son cher maître, le jeune artiste devait y exposer son œuvre ; il y travaillait dès l’aurore et ne laissait son ciseau que très tard dans la nuit. Ce labeur lui était trop doux pour qu’il en ressentît de la fatigue ; enfin, à la complète satisfaction de maître Simonet, quelques jours avant la date de l’ouverture, le chef-d’œuvre était achevé.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Tout le Marseille distingué et artistique se pressait, le jour du Salon de 1898, autour du splendide calvaire du brillant artiste : Benoit Guéridou. Au pied du chef-d’œuvre, sur une carte on lisait ces deux mots, qui résumaient le verdict du jury : Hors concours ! Ce n’était qu’un concert de louanges : quel génie ! disaient les uns ; c’est un Michel-Ange ! disaient les autres. Le vieux sculpteur exultait. ! Quant à Benoit, il s’était dérobé aux félicitations ; à cette heure de triomphe il était agenouillé dans une église voisine et parlait à Dieu.

— « Ma tâche est accomplie — lui disait-il — Dans la me-