Aller au contenu

Page:Monneron - Poésies, 1852.djvu/73

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

» Au prix de tout mon sang rends-moi, rends-moi ma lyre,
» Et par un dernier chant couronne mon martyre !
» Ma tombe à la montagne ! oh ! viens m’y transporter !
» Là je ne mourrai plus, car mourir c’est douter ! »

C’est pourquoi le chasseur, afin de le séduire,
De la mort empruntait la pâleur et la lyre ;
Et mêlant son vertige à celui du chanteur,
Par la montagne allait, triste consolateur,
L’entraîner dans l’abîme en sa chute inouie,
Et lui rendre la lyre en lui prenant la vie.
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·

Le chasseur cependant, sur les pas de sa proie,
Se perd dans les forêts… Une rumeur de joie
Confuse, fantastique, accompagne ses pas.
Des vaporeux danseurs la peuplade, là-bas,
Au pied des bruns rochers, sur de fraîches pelouses,
Glisse… et l’on dirait voir de nouvelles épouses,
Dans leurs folâtres jeux pressant leurs pas tremblants,
Sveltes, le front caché sous de longs voiles blancs.
Mais le bruit de leurs pas devient plus faible encore,
Et l’on n’entend frémir que le blanc sycomore,
Aux fentes du rocher, confiant à la nuit
Les pleurs ou les secrets du danseur qui s’enfuit.