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Page:Monselet - Les Oubliés et les Dédaignés, 1876.djvu/270

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OUBLIÉS ET DÉDAIGNÉS.

C’était Denise, — Denise qui, depuis un mois, avait repris secrètement son ancien métier pour me faire vivre !

XI

L’ACADÉMIE DE LA RUE DU CHAUME

Il ne me reste plus qu’à vous dire comment cet ange me fut enlevé.

Elle avait trop souffert dans son enfance et dans sa jeunesse pour vivre longtemps. Notre misère était sans issue. Les derniers ressorts de ce corps et de cette âme se brisèrent dans une lutte désespérée : après six ans de douleurs partagées avec moi, elle tomba malade — pour ne pas guérir.

Les soins éclairés d’un de mes amis, nommé Rondel, excellent médecin, prolongèrent son agonie jusqu’à l’automne de 1772.

Il y avait six mois que je la voyais s’en aller, calme, pâle, mais souriante toujours. — Croiriez-vous que souvent elle essayait de relever mon courage, et qu’elle m’engageait à travailler, en me montrant encore le succès et l’aisance dans un avenir tout prochain ! Mais, de ce côté-là, l’illusion était bien morte en moi. J’écrivais, cependant, de temps à autre, pour lui faire plaisir…

Je me souviendrai toujours du 5 octobre, qui était un samedi.

Ce jour-là, j’avais passé la plus grande partie de l’après-dînée sous les arbres du Palais-Royal, et M. le marquis de Villevieille m’avait prêté un petit écu.