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Page:Monselet - Les Oubliés et les Dédaignés, 1876.djvu/375

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PLANCHER-VALCOUR.

ment qu’il occupait depuis vingt ans. Le propriétaire lui annonça un jour que la maison était vendue ; frappé de cette nouvelle, le Nestor de la littérature s’écria : « Ah ! vous me faites un grand chagrin, je ne m’y attendais pas, et je m’étais arrangé pour mourir ici. — L’acquéreur ne vous pressera pas, répondit le propriétaire ; prenez un mois, six semaines… — Quinze jours, c’est assez, » murmura tristement La Place. Effectivement, saisi par ce coup imprévu, il mourut avant l’expiration de la quinzaine, le 10 mai 1793.

Plancher-Valcour traversa la Terreur et aborda paisiblement au Directoire. À cette époque, le gouvernement voulant récompenser en lui la passion politique et l’impiété, — il venait de publier un poëme héroï-comique sur le Consistoire ou l’Esprit de l’Église[1], — le nomma… Devinez quoi ? Juge de paix au faubourg Saint-Martin. Juge de paix lui, le citoyen Aristide, qui s’était dit autrefois de si dures et de si plates vérités, sur l’air : Aussitôt que la lumière.

Chacun de nous à sa manière,
Se rend utile à l’État :
Les uns défrichent la terre,
Les aut’ volent au combat.

  1. « Voici le coup de pied de l’âne, dit le libraire Colnet dans ses Étrennes de l’Institut ; ce poëme donne une bien mauvaise idée du cœur et de l’esprit de son autour ; on le croirait écrit par un cocher ivre sortant du cabaret. Voici la plus noble comparaison qu’il ait employée :

    Pour faire niche à Dieu, près de ses favoris,
    Le diable est comme un chat qui guette une souris. »